Art et architecture au cœur de l’engagement de la Vaudoise

Un article rédigé par Laure Bruttin-Franck pour Bilan.ch, le 3.07.2024

Le siège de la Vaudoise, situé à Lausanne, c’est lui. Lui, l’architecte suisse dont l’aura dépasse les frontières helvétiques. Mais n’attribuer à Jean Tschumi que le travail réalisé sur le bâti serait emprunter un raccourci que Nathalie Bender, responsable opérationnelle de la commission artistique de la Vaudoise Assurances, ne souhaite surtout pas (voir se) faire: «Jean Tschumi ne s’est pas contenté de dessiner le bâtiment, il a créé tout un projet artistique autour (colorimétrie, meubles dessinés par ses soins, habillage des murs avec des œuvres d’art, etc.), donnant concrètement vie au concept de corporate architecture (qui envisage la conception architecturale et tout ce qui est en lien avec celle-ci comme une vitrine, un support, au service de l’image de l’entreprise).»

Une notion qui aurait pu rester relativement confidentielle si ce n’est l’ambition de la Vaudoise, soutenue par Jean Tschumi, de la rendre visible, mais également vivante au travers du soutien apporté à d’autres artistes. De là est née la commission artistique.

Une commission artistique ouverte à l’expression plurielle

Après une période faste dans les années 1950-1960, la commission artistique de la Vaudoise a pris un second souffle en 2009, avec l’engagement notamment d’une consultante en histoire de l’art, Catherine Othenin-Girard. «Son arrivée a vraiment permis de professionnaliser la commission, en concrétisant par des actes réguliers sa mission: celle d’un soutien aux artistes actuels ayant un lien avec la Suisse, via l’acquisition d’œuvres sur mesure, et celle d’entretien et de valorisation de la collection», explique Nathalie Bender.

Chaque année, placée sous l’égide du secrétariat général et guidée par Catherine Othenin-Girard, la commission artistique, qui réunit tant des membres de la direction que des collaborateurs, sélectionne des artistes répondant à ces critères. Un seul d’entre eux sera finalement retenu, la commission ne passant en principe qu’une seule commande par année, «à l’exception d’achats one shot, de temps en temps, mais qui concernent des œuvres du catalogue de l’artiste».

La commande majeure comme l’appelle Nathalie Bender, relève quant à elle du sur-mesure: photographies, peintures murales format XXL, comme celle de l’artiste fribourgeois Stéphane Dafflon exposée le long de l’escalier dessiné par Jean Tschumi et qui en reprend le mouvement par un double effet miroir et d’optique, tableaux par l’artiste helvète Mauren Brodbeck à mi-chemin entre la photographie et la peinture, mettant en scène de manière très réaliste le mobilier et l’univers de la Vaudoise au sein de son bâti, sculpture à l’effet vertigineux d’un escalier en équilibre («Beautiful Steps #9») réalisée par le duo d’artistes suisses Sabina Lang et Daniel Baumann, reproduction monumentale de l’artiste irlandais Nigel Peake sur les bâches habillant le siège de la Vaudoise durant sa rénovation… et la liste est encore longue.

Tous ont carte blanche, dans un certain cadre toutefois: «Il faut que l’œuvre crée un dialogue avec l’architecture et toute la vision artistique impulsée par Jean Tschumi dans nos bâtiments, du choix des couleurs à la manière dont elles se répondent entre elles», précise la coordinatrice de la commission.

Beautiful Steps #9 - Werk des Schweizer Künstlerduos Sabina Lang und Daniel Baumann

Vitrine pour les artistes et enjeu d’image de marque

Une visibilité intéressante pour les artistes, mais aussi un moyen pour la Vaudoise de faire passer, par la beauté de l’art, sa communication institutionnelle. «Grâce à cet appui à la culture, nous témoignons de notre mission d’entreprise citoyenne. Cela passe par le développement et l’entretien de notre collection, mais aussi par du mécénat, des soutiens plus confidentiels et des dons.»

À ce jour, la collection de la commission s’élève à plus de 300 œuvres: peinture, sculpture, photographies, design, littérature, mais aussi interaction design. Une collection de niche, qualitative compte tenu du caractère exclusif des réalisations. Un patrimoine en croissance, qui vit aussi grâce à l’implication des collaboratrices et collaborateurs de la Vaudoise.

L’art comme vecteur de lien

Si l’art habille la Vaudoise de touches plus ou moins visibles au cœur du bâti, le risque était de le réduire à une dimension muséale, où les collaboratrices et collaborateurs ne seraient que de simples spectateurs. Où le dialogue entre art et architecture se lirait en filigrane.

«Nous avons réfléchi à un moyen d’impliquer les équipes afin de créer un véritable lien entre elles et les œuvres, et rendre ainsi cette collection vivante. C’est de là qu’est né l’Art Club.»

Association regroupant à ce jour plus de 70 membres – parmi les quelque 2000 collaboratrices et collaborateurs de la Vaudoise, dont 900 travaillant au siège –, sa mission est de décloisonner l’engagement culturel de la Vaudoise afin que celui-ci soit aussi porté et incarné par les équipes. Visites guidées, initiation au cours de fusain, concours photo, décryptage des œuvres, l’association séduit un public hétéroclite, «tout âge, fonction dans l’entreprise et rôle hiérarchique confondus», se réjouit Nathalie Bender.

De l’héritage de Jean Tschumi, la Vaudoise a su construire au fil des décennies un vrai engagement culturel et artistique qui honore la mémoire de l’architecte de renom, tout en dynamisant et actualisant sa pratique, reconnue comme majeure aujourd’hui encore par la corporation des architectes architecturale en Suisse et à l’international. Sur ce terrain fertile, des œuvres sont créées, donnant matière à imagination, à réflexion, challengeant les artistes. Sans doute là le plus beau cadeau que la Vaudoise peut leur faire.